Wednesday, July 27, 2011

Mon plat préféré



Depuis quelque temps je regarde à la télévision les épisodes d’un documentaire au concept très original. Il s’agit de faire valoir un aspect particulier de la culture de telle ou telle contrée de la planète en suivant un enfant ordinaire vivant dans cette contrée dans ses activités durant une journée ordinaire. L’émission est dédiée d’après moi aux plus jeunes mais je n’en rate jamais un épisode volontairement.
Vint le tour d’une petite fille vivant en Thaïlande. Premier choc : là-bas ils consomment le riz aux trois repas ! Dire qu’en Haïti, la plaisanterie veut que les Artibonitiens ne mangent que du riz et à tous les repas, même en en-cas. Ces détracteurs seraient surpris de voir que cette possibilité est déjà un fait établi pas trop loin de chez nous.
Je suis originaire de l’Artibonite et Je me permets d’infirmer cette rumeur, à mon niveau tout au moins. Mais je peux également affirmer ce complexe vis-à-vis du riz qui survit chez une grande majorité d’Artibonitiens. Pour eux, manger une céréale autre que le riz est dégradant. Et ils ne sentent rassasiés après le repas de midi que s’il y a eu du riz au menu. Mon frère a trouvé le terme parfait pour exprimer son attachement au riz : « rice corporation ! ». Enfin je constate que dernièrement ce complexe s’est quelque peu répandu bien au-delà des frontières de l’Artibonite…
J’en parle, moi, de cet état de chose parce qu’a toute règle il faut une exception. Je suis l’exception qui confirme ce culte du riz chez les Artibonitiens. J’aligne toutes les excuses : la diète pour ma ligne, mon gout pour la variété en cuisine, le riz étant l’ennemi numéro 1 du diabète, le riz vous fait pousser du ventre etc…
Enfin, je suis l’exception jusqu’à un certain point car mon plat préféré ne saurait s’en passer. J’adore « Lalo». Là, mon amie m’arrêterait surement pour me dire : « Jeune fille, on n’adore que Dieu seul ». Mais prenez le mot dans son sens d’amour viscéral. En effet, « Lalo » ne me procure de véritable plaisir qu’accompagné de riz blanc : du riz la crête ou Madame Gougousse, produit local, produit de l’Artibonite, arrosé avec l’eau du fleuve.
Les foires gastronomiques réalisées assez régulièrement sur le Champs de Mars tous les 1er Mai ces dernières années ont contribué à la vulgarisation et à la promotion des plats typiques aux différentes régions d’Haïti. Et je me permets de faire la sourde oreille lorsqu’un « Port-au-Prince » ou autre oiseau du genre vient à me demander de lui expliquer ce dont il s’agit. D’ailleurs on en propose actuellement dans tous les petits restaurants et à tous les coins de rue de la ville.
Lalo est un plat fait à partir de la feuille portant le même nom, cuite à l’étouffée avec de la viande, des crustacées et tout ce que vous voulez. Je ne l’ai jamais cuisiné personnellement mais je connais la théorie par cœur ! Par exemple, je sais qu’il faut toujours laver les feuilles avant de les hacher et qu’il ne faut surtout pas découvrir la chaudière avant cuisson complète au risque de se retrouver avec une mixture où les feuilles seront sèches et rigides au lieu d’être fondantes. Il est possible également de mélanger, « couper » comme on dit normalement, avec d’autres feuilles comme le caya, le cresson… Et ne pas oublier le bouquet final : bien épicez !
Il existe une variante du plat où l’on fait cuire du calalou avec les feuilles de lalo. Cette formule est aussi délicieuse mais risque de ne pas plaire à ceux qui, comme mon frère, ne supportent pas les ingrédients glissants ou le calalou tout simplement.
Quant à moi, je ne rate jamais l’occasion qui se présente pour en déguster et, à chaque fois, j’éprouve le même plaisir, la même excitation. Il arrive que la tentation et le plaisir l’emportent même sur les précautions sanitaires ; pas la peine de vous faire un dessin ! Je trouve encore le moyen d’éveiller la curiosité des gens de mon entourage envers ce plat. J’en ai converti quelques autres qui se sont lancés depuis dans la quête permanente de Lalo tout comme moi. Encore que je comprends difficilement ce phénomène à mon niveau vu que je suis plutôt du genre à m’efforcer à manger tout juste ce qu’il faut pour ne pas mourir.
Ce plat, vraiment, est l’exception qui confirme la règle !

Lilou

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